A l'instar du Lieu Unique de Nantes, le Channel est à l'origine (1983) un Centre de développement culturel sans lieu d'attache. L'opportunité de disposer des anciens abattoirs de Calais déclenche pour son directeur Francis Peduzzi l'écriture d'un projet de développement très spécifique dont la ville de Calais confie la programmation à AG Studio (à l'époque "Aubry & Guiguet") que François Guiguet assume personnellement. Les standards des friches sont adoptés dans cette programmation qui se devait de respecter plusieurs qualités: rester proche de l'existant pour éviter les constructions coûteuses, conserver l'aspect ouvert d'un site déjà stratifié, intégrer une école de cirque dans un bâtiment chapiteau stable; intégrer des lieux de vie ouverts à tous les publics tout en donnant aux artistes de toutes disciplines les espaces ad hoc pour leur travail. Le concours a suivi la procédure des "marchés de définition" laissant une certaine latitude aux concurrents de revisiter le programme. L'équipe de Patrick Bouchain l'a remporté sur les principes qu'il affectionne en reconsidérant certains éléments du site (destruction de l'ancien crématoire) et du programme (augmentation des volumes des Plateaux de travail, création d'un habillage au Château d'eau) que sa capacité à tenir des enveloppes financières frugales permettaient. Le résultat est l'un des plus remarquables en termes d'adhésion des publics à un lieu de création et de diffusion (Le Channel est une scène Nationale) en France. 6000 habitants à l'inauguration, des milliers de personnes à chaque session de "Feux d'Hiver" et une véritable appropriation collective du lieu. François Delarozière s'est attaché à donner une forme atypique au gradin de la salle "Le Passager", à l'accueil et à ciseler certains éléments architectoniques, ce à quoi les anciens ouvriers calaisiens sont particulièrement sensibles. Le Channel est l'un des plus beaux sites de ce type en France.